Infarctus médullaire : Définition et prise en charge

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L’infarctus médullaire est une affection durant laquelle la moelle épinière ne reçoit pas assez (ou pas du tout) de sang pour se nourrir et s’oxygéner. C’est donc un accident vasculaire médullaire (l’équivalent de l’accident vasculaire cérébral ou AVC).

L’infarctus médullaire est très rare comparée aux AVC. Il peut toutefois entraîner des déficits neurologiques majeurs, notamment la para ou tétraplégie.

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Anatomie : vascularisation de la moelle épinière

Avant de définir ce qu’est un infarctus médullaire, il est important de rappeler brièvement quelques bases anatomiques sur la vascularisation de la moelle épinière, car c’est sur cette dernière que repose toute la physiopathologie de la maladie.

La vascularisation de la moelle épinière figure parmi les plus complexes de l’organisme humain tant le nombre des artères qui y contribuent est important. Celle-ci est essentiellement assurée par :

  • Deux artères spinales postérieures (dorsales) latérales

Elles proviennent de l’artère vertébrale (elle-même issue de l’artère sous clavière, parfois directement de l’aorte) et vascularisent le tiers postérieur de la moelle épinière en donnant un riche réseau anastomotique d’où naissent des artères perforantes.

  • Une artère spinale antérieure (ventrale) médiane

 

Elles proviennent des branches des artères vertébrales et assurent la vascularisation des deux tiers antérieurs de la moelle épinière.

Cette artère donne peu d’artères afférentes au niveau de la région cervicale supérieure, mais elle donne naissance à une artère de grand calibre au niveau de la région thoracique inférieure appelée «artère d’Adamkiewicz».

 

Qu’est-ce que l’infarctus médullaire ?

L’infarctus médullaire est une interruption ou diminution de l’apport sanguin destiné à la moelle épinière. On en distingue deux principaux types :

Ischémie globale

L’interruption de la vascularisation est secondaire à un état de bas débit systémique, notamment en cas d’arrêt cardiaque, d’hypotension sévère prolongée ou d’hémorragie massive par exemple.

L’ischémie de la moelle prédomine généralement au niveau de la région dorso-lombaire (zones les moins perfusées).

Ischémie focale

Ici, l’ischémie est localisée au niveau du territoire d’une des artères vascularisant la moelle. Le plus souvent, c’est l’artère d’Adamkiewicz qui est touchée, ou bien l’une des artères de la charnière dorso-lombaire.

Quelles sont les causes de l’infarctus médullaire ?

De nombreuses situations peuvent être à l’origine d’un infarctus médullaire :

  • Certaines pathologies de l’aorte (l’artère à l’origine de toutes les artères du corps) : notamment l’athérome (dépôt de graisses au niveau des parois artérielles), la dissection aortique (déchirure de la couche interne de l’aorte appelée « intima », c’est une urgence absolue mettant en jeu le pronostic vital à très court terme), lésion aortique iatrogène (suite à une chirurgie de l’aorte ou autre acte invasif thoracoabdominal) …
  • Occlusion des artères spinales : lors de certaines maladies infectieuses (tuberculose, maladie de Lyme, zona, méningite fongique…), inflammatoires (sarcoïdose, lupus, maladie de Sjögren…), toxiques, hématologiques ou bien d’origine iatrogène.
  • Occlusion des artères vertébrales: rappelons que les artères vertébrales alimentent les deux artères spinales postérieures et l’artère spinale antérieure. Leur occlusion (athérome, dissection…) est donc responsable d’une diminution du débit sanguin qui parvient à ces artères irriguant la moelle épinière.
  • Occlusion des artères intercostales thoraciques et lombaires (iatrogène) : ces artères alimentent l’artère spinale antérieure médiane.
  • Défaillance hémodynamique : cela inclut toutes les situations où le cœur ne parvient plus à assurer un débit sanguin suffisant pour perfuser les cellules de l’organisme. Une telle situation peut s’observer notamment en cas d’infarctus du myocarde (crise cardiaque), de certains troubles du rythme cardiaque (tachycardie supraventriculaire, fibrillation ventriculaire…), d’hémorragie massive avec collapsus (hypotension sévère), de déshydratation sévère… Toutes ces affections peuvent se compliquer d’infarctus médullaire, bien que ce dernier soit au second plan (compte tenu de l’extrême gravité de ces pathologies).

 

 

 

Quels sont les symptômes de l’infarctus médullaire ?

L’infarctus médullaire est très rare par rapport aux infarctus cérébraux, et ce, en raison de la taille plus petite de la moelle épinière (comparativement à celle du cerveau), de la richesse en anastomoses de son réseau artériel et de rareté des atteintes athéromateuses au niveau des artères médullaires.

Dans les rares cas où un infarctus médullaire survient, divers symptômes apparaissent en fonction du siège de l’ischémie et de son étendue.

Classiquement, l’infarctus médullaire se manifeste par un syndrome spinal antérieur caractérisé par la survenue de :

  • Douleurs rachidiennes d’installation brutale ou rapidement progressive.
  • Paraplégie (paralysie des membres inférieurs) ou tétraplégie aiguë (paralysie des 4 membres).
  • Trouble sous-lésionnel de la sensibilité thermoalgique : c’est-à-dire une incapacité à ressentir la douleur, le chaud ou le froid au niveau de toute la partie du corps innervée par le segment de la moelle épinière situé au-dessous sous la lésion.
  • Troubles sphinctériens tels que l’incontinence urinaire ou fécale.

D’autres symptômes neurologiques dont la nature, le caractère uni ou bilatéral et l’intensité dépendent du siège et de l’étendue du territoire ischémié de la moelle épinière.

Comment se pose le diagnostic d’infarctus médullaire ?

Le diagnostic de l’infarctus médullaire repose sur l’imagerie, particulièrement l’IRM qui permet, dès la phase initiale, d’exclure certains diagnostics différentiels tels que la compression médullaire aiguë.

Toutefois, dans la mesure du possible, le diagnostic de l’infarctus médullaire ne doit pas être un diagnostic d’exclusion. Il doit reposer un tableau clinique évocateur et un certain nombre de signes directs et indirects à l’IRM.

D’autres examens peuvent être réalisés afin de préciser la cause de l’infarctus médullaire, notamment :

  • La ponction lombaire : elle permet d’éliminer bon nombre de diagnostics différentiels.
  • L’échographie transœsophagienne : elle permet la visualisation de l’aorte à la recherche d’un athérome, d’une dissection, d’une coarctation, d’un anévrysme…
  • L’angiographie médullaire: pour visualiser les artères de la moelle épinière et dépister une éventuelle occlusion.

Quel est le traitement de l’infarctus médullaire ?

Malheureusement, aucun traitement médicamenteux spécifique n’a prouvé son efficacité dans la prise en charge de l’infarctus médullaire.

Par conséquent, le traitement de l’infarctus médullaire, indépendamment du traitement de la cause, est symptomatique. En voici les grandes lignes :

  • Rééducation : la kinésithérapie est la base du traitement chez les patients ayant présenté un infarctus médullaire. Elle vise à limiter les troubles moteurs grâce à la mise en œuvre de différents exercices passifs et actifs
  • Prévention des escarres : des soins cutanés quotidiens seront effectués pour éviter les complications de l’alitement prolongé.
  • Soins sphinctériens : afin d’éviter les complications infectieuses, des sondages intermittents peuvent être réalisés.

Références

[1]       D. Leys, C. Cordonnier, C. Masson, et J.-P. Pruvo, « Infarctus médullaires », EMC-Neurologie, vol. 2, no 2, p. 163‑174, 2005.

[2]       G. Saliou, M. Théaudin, C. J.-L. Vincent, et R. Souillard-Scemama, « Infarctus médullaire », in Guide pratique des urgences neurovasculaires, Springer, 2011, p. 165‑170.

[3]       C. Cordonnier, « Infarctus artériels médullaires: où en sommes-nous en 2022? », Pratique Neurologique-FMC, vol. 13, no 1, p. 63‑66, 2022.

[4]       M. A. Mnaili et A. Bourazza, « Infarctus médullaire aigu: un diagnostic méconnu au pronostic sévère », Pan African Medical Journal, vol. 31, no 1, 2018.

[5]       K. Kim et al., « Mechanism of medullary infarction based on arterial territory involvement », Journal of clinical neurology, vol. 8, no 2, p. 116‑122, 2012.

[6]       J. Stricker, R. Hourrez, R. N. Ikazabo, G. Bruninx, et P. Seeldrayers, « Infarctus médullaire cervical dans un contexte de discopathie pluri-étagée », Rev Med Brux, vol. 35, p. 96‑8, 2014.

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