Infiltration cervicale : Indication et prise en charge

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Les infiltrations rachidiennes de corticoïdes sont utilisées en pratique courante dans le traitement de nombreuses douleurs radiculaires et névralgies cervico-brachiales. Leur objectif premier est de supprimer une éventuelle inflammation impliquée dans la genèse des douleurs, et donc de soulager, voire supprimer ces dernières.

L’infiltration cervicale peut se révéler efficace dans le traitement de certaines cervicalgies chroniques.  Toutefois, son effet antalgique est de courte durée, voire parfois absent… Il est donc important de connaître les indications et les dangers de cette procédure ; une évaluation précise du rapport bénéfice-risque est de rigueur avant d’y avoir recours.

Qu’est-ce que l’infiltration cervicale ?

Dans le domaine médical, l’infiltration fait référence à l’injection d’une substance liquide (contenant un principe actif) directement dans la zone à traiter, hors vaisseaux sanguins. Cette méthode est utilisée notamment en anesthésie (injection d’une substance anesthésique au voisinage d’un nerf pour bloquer l’influx nerveux), et en rhumatologie avec l’injection d’anti-inflammatoires (corticoïdes) au niveau de certaines articulations.

Linfiltration cervicale est donc une procédure médicale qui consiste à injecter un principe actif, généralement des corticoïdes (anti-inflammatoires), directement au niveau de la source de la douleur cervicale. Ainsi, le médicament agit au niveau local en réduisant l’inflammation et les sensations de douleur sans diffuser à l’ensemble du corps comme lorsqu’on reçoit une injection intraveineuse ou bien un traitement oral (voie générale ou systémique).

L’infiltration cervicale se fait au niveau de l’espace graisseux épidural du canal rachidien (entre l’os et la dure mère, enveloppe la plus externe du système nerveux central). Par exemple, cela permet de diminuer les phénomènes inflammatoires au niveau d’une racine nerveuse comprimée par une hernie discale cervicale, et donc de soulager les douleurs.

Quelles sont les indications de l’infiltration cervicale ?

L’infiltration cervicale est envisagée dans certaines cervicalgies chroniques en cas d’échec des différents traitements médicamenteux de première intention (antalgiques, anti-inflammatoires, kinésithérapie…).

Elle est proposée dans la radiculalgie du membre supérieur en rapport avec un conflit entre le disque intervertébral et une racine nerveuse cervicale. Souvent dans le cadre d’une hernie discale.

Selon les dernières recommandations, les cervicalgies doivent persister plus de 7 semaines malgré un traitement médical bien conduit avant d’envisager une infiltration cervicale.

Évidemment, il ne doit pas y avoir un déficit neurologique important, car cela nécessiterait une prise en charge différente (chirurgie).

Dans certaines situations, l’infiltration cervicale peut être envisagée même si la douleur dure depuis moins de 7 mois, notamment en cas de cervicalgies hyperalgiques d’origine radiculaire (douleurs très intenses résistant aux morphiniques).

Quelles sont les contre-indications de l’infiltration cervicale ?

L’infiltration rachidienne cervicale est contre-indiquée dans les situations suivantes :

  • Instabilité hémodynamique : on ne réalise pas d’infiltration cervicale chez un patient en insuffisance cardiaque aiguë par exemple…
  • Syndrome de dysfonction plaquettaire : affection caractérisée par une incapacité des plaquettes à s’agréger afin de former un clou plaquettaire. Il existe donc un risque hémorragique en cas de réalisation du geste.
  • Thrombocytopénie sévère : plaquettes en nombre insuffisant. Le risque est, là aussi, la survenue d’une hémorragie difficilement contrôlable.
  • Trouble de la coagulation : hémophilie, maladie de Von Willebrand, prise d’un traitement anticoagulant.
  • Antécédent de traumatisme cervical.
  • Infection intercurrente (fièvre, frissons…).
  • Septicémie (présence de bactéries dans le sang).
  • Infection locale: au niveau du site d’injection.
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Il existe également des contre-indications relatives, c’est-à-dire qu’il est possible de réaliser une infiltration cervicale malgré leur présence (à condition de les corriger ou de surveiller étroitement le patient). Parmi elles, on peut citer l’allergie au produit de contraste et la prise d’un traitement antiagrégant plaquettaire (aspirine, clopidogrel…).

Quels sont les risques de l’infiltration cervicale ?

L’infiltration cervicale, malgré le fait qu’elle soit largement utilisée dans le traitement des douleurs radiculaires, n’est pas dénuée de risques et de complications.

Risque infectieux

Comme c’est le cas pour tout geste invasif, il existe un risque infectieux. En effet, malgré les mesures rigoureuses d’asepsie, une infection est toujours possible au niveau du site d’injection. Cette dernière peut par la suite se propager aux structures voisines ou provoquer une septicémie (présence de bactéries dans le sang).

Heureusement, ces infections sont relativement rares (1 à 2%) et sont généralement mineures.

Toutefois, des infections plus graves ont été rapportées :

Risque hémorragique

L’espace épidural est une structure richement vascularisée. Ainsi, au cours d’une infiltration cervicale, il existe une possibilité de léser un vaisseau sanguin, ce qui peut se solder par un hématome rachidien (c’est-à-dire l’accumulation de sang) au niveau de la région cervicale.

Le risque hémorragique est évidemment plus élevé chez les patients présentant une anomalie de l’hémostase ou un trouble de la coagulation (hémophilie, traitement anticoagulant en cours…).

Risque allergique

Il existe un risque de réactions allergiques ou anaphylactiques au produit de contraste, au produit anesthésique ou aux corticoïdes. Elles peuvent se manifester dans les deux heures qui suivent l’injection, mais elles sont assez rares.

Un interrogatoire détaillé, une surveillance étroite des paramètres hémodynamiques et une équipe entrainée prête à intervenir en cas de besoin sont toujours nécessaires lors de la réalisation de ce geste.

Risque de complication neurologique

Des enquêtes réalisées auprès de radiologues ont recensé un nombre inquiétant d’infarctus médullaires qui surviennent dans les suites d’infiltrations rachidiennes cervicales.

D’autres complications neurologiques liées à cette procédure ont été rapportées :

  • Accidents vasculaires : pouvant toucher le cerveau (AVC), la moelle épinière ou le cervelet.
  • Hématomes épiduraux (accumulation de sang dans l’espace épidural).
  • Lésion de la moelle épinière.
  • Infarctus médullaires ou centraux par embolie.
  • Convulsions (rares).
  • Pneumencéphalie (présence d’air dans la boite crânienne suite à une brèche).
  • Cécité (temporaire ou durable par nécrose de la rétine ou choriorétinopathie).
  • Tétraplégie avec risque de décès par arrêt cardiaque.
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Comment se déroule une infiltration cervicale ?

Lorsque vous souffrez de cervicalgies chroniques, plusieurs traitements médicamenteux peuvent vous être proposés selon la pathologie qui les cause. Ce n’est qu’en cas d’échec de ces traitements que votre médecin traitant envisagera d’autres alternatives telles que l’infiltration cervicale, voire la chirurgie comme dernier recours.

Une fois l’infiltration cervicale proposée, vous passerez par différentes étapes.

D’abord, vous serez orientés vers un radiologue opérateur pour une consultation spécialisée. Ce dernier vous interrogera, vous examinera et consultera votre dossier médical (contenant les différents examens réalisés : radiographies, scanners, IRM, bilan biologique…) afin de, entre autres :

  • S’assurer qu’il existe bien une indication à la réalisation du geste.
  • Vérifier l’absence de contre-indications (infection, trouble de la coagulation…).
  • Repérer le site précis du conflit et sa nature (éventuellement en réalisant un nouveau scanner).

Ensuite, une fois toutes ces vérifications faites, on vous expliquera les différentes étapes de la procédure que vous allez subir ainsi que ses risques et effets secondaires. Si vous prenez des traitements antiagrégants plaquettaires, on vous demandera, en accord avec votre médecin traitant ou cardiologue, de les arrêter au moins 5 jours avant le geste.

Enfin, vous serez convoqué pour la réalisation de l’infiltration cervicale. Cette procédure est réalisée dans un cabinet de radiologie. Elle ne dure qu’une vingtaine de minutes et comporte les étapes suivantes :

  1. Installation sur la table de scanner : votre radiologie ou l’un des membres de son équipe vous installera sur la table de scanner en position ventrale. En effet, l’infiltration cervicale s’effectue avec guidage scanographique pour atteindre très précisément le site pathologique tout en évitant de léser les différentes structures voisines.
  2. Repérage du site à infiltrer: la cible de l’infiltration est repérée de manière précise et en temps réel grâce au scanner.
  3. Préparation de la zone d’injection: la zone cutanée est soigneusement désinfectée puis anesthésiée localement. Toute la procédure sera réalisée dans le plus grand respect des mesures d’asepsie afin de réduire au maximum le risque infectieux.
  4. Introduction de l’aiguille : jusqu’au site à traiter (articulation postérieure…), toujours sous guidage scanographique.
  5. Injection du produit de contraste : le radiologue injecte une petite quantité d’iode (produit de contraste) qui permettra de confirmer la bonne position de l’aiguille et d’éviter de léser les différents organes.
  6. Injection des corticoïdes : une fois l’aiguille en bonne position, on injecte les corticoïdes (infiltration proprement dite).
  7. Retrait de l’aiguille : une fois l’infiltration réalisée, l’aiguille est précautionneusement retirée par le radiologue, toujours sous guidage scanographique. Un pansement sera mis en place afin de prévenir le risque d’infection.4

Durant la réalisation de l’infiltration, il est possible de ressentir des douleurs similaires à celles que vous ressentez habituellement (reproduction de la douleur).

Une fois la procédure terminée, on vous demandera de rester une trentaine de minutes en observation afin de s’assurer de l’absence de signes anormaux. Vous pourrez ensuite repartir chez vous avec le compte rendu de l’infiltration cervicale et votre dossier médical.

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Infiltration cervicale : Suites

Après la réalisation d’une infiltration cervicale, une recrudescence des cervicalgies peut être ressentie durant les deux premiers jours. Il ne faut pas s’inquiéter, il suffit de prendre un antalgique et de se reposer, elles cèdent généralement dans les 24 à 48 h. Un arrêt de travail peut vous être prescrit par votre médecin traitant.

La réponse à l’infiltration cervicale est variable d’un patient à un autre et selon l’indication, la nature des lésions… La diminution des douleurs se remarque 3 à 7 jours après le geste en moyenne.

Toutefois, le résultat n’est pas toujours au rendez-vous. Il est parfois nécessaire de reprogrammer une seconde séance d’infiltration cervicale (après un mois en général). Le nombre maximum d’infiltrations cervicales qu’il est possible de réaliser est de 3 par an.

En cas de non-réponse aux infiltrations cervicales, on oriente le patient en chirurgie pour une consultation spécialisée (en dernier recours).

Références

[1]  P. Brunner et al., « Percutaneous infiltrations of cervical, thoracic, and lumbar spine », in Seminars in interventional radiology, 2002, vol. 19, no 03, p. 219‑228.

[2]  E. Masson, « Les infiltrations foraminales cervicales et lombaires sous scanner », EM-Consulte. https://www.em-consulte.com/article/751576/les-infiltrations-foraminales-cervicales-et-lombai (consulté le 17 mars 2022).

[3]  Evangelia Passia et Stéphane Genevay, « Complications des infiltrations rachidiennes », Revue Medicale Suisse. https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2017/revue-medicale-suisse-553/complications-des-infiltrations-rachidiennes (consulté le 16 mars 2022).

[4]  C. Cyteval et al., « Cervical radiculopathy: open study on percutaneous periradicular foraminal steroid infiltration performed under CT control in 30 patients », Am. J. Neuroradiol., vol. 25, no 3, p. 441‑445, 2004.

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